Évolutions législatives et jurisprudentielles

Cette nouvelle lettre d’information suit et approfondit la ligne tracée dès la première, consistant à présenter une “veille” juridique des développements essentiels de la common law de tradition britannique telle qu’appliquée au quotidien dans les juridictions de la “Grande Asie” qui en relèvent, de l’Australie jusqu’à l’Inde.

Cette ambition caractérise notre cabinet, installé en Malaisie, au cœur géographique et juridique de cette vaste région.

Les évolutions législatives et jurisprudentielles de Juillet 2019 ont été sélectionnées parce qu’elles nous semblent susceptibles d’influencer les parlements et tribunaux (ces derniers par application du principe juridique de “persuasiveness”) au travers des juridictions des pays concernés.

Pays couverts : Malaisie – Singapour – Australie – Inde – Chine (Hong Kong SAR) – Myanmar – Papouasie Nouvelle Guinée.

Joint-Venture en Chine

Lettre d'information N°2 - Juillet 2019

Malaisie

Législation

  • Loi sur les Sociétés

Un amendement à la loi sur les sociétés [Companies (Amendment) Bill 2019] a été voté par la chambre basse du Parlement malaisien (Dewan Rakyat) le 10 juillet et sera bientôt soumis à la chambre haute (Dewan Negara).

Parmi les dispositions les plus importantes du projet de loi, figurent :

– le droit de la société, de ses administrateurs ou d’un créancier de demander à la High Court la nomination d’un administrateur judiciaire qualifié à cette fin (“judicial manager”). Par ailleurs, la High Court ne pourra plus, comme c’est le cas à présent, rejeter la demande au motif qu’un administrateur a été désigné et qu’un créancier privilégié s’y est opposé, une seule de ces deux conditions étant désormais suffisante, ce qui vise à renforcer la protection des créanciers privilégiés.

– la facilitation du rachat par la société d’actions privilégiées (“redemption of preference shares”) par utilisation du capital social, qui ne sera plus soumise à la condition préalable de reconstitution au même montant du dit capital mais seulement à l’obligation pour les administrateurs de certifier que la société demeure solvable.

– une simplification des formalités requises pour les documents engageant la société [apposition du “common seal” ou signature de deux administrateurs (“directors”)] qui ne seraient désormais plus applicables que lorsqu’un telle formalité est exigée par la loi, une résolution, un contrat ou les statuts (“constitution”).

– la possibilité pour la High Court d’exiger d’une société engageant une action judiciaire d’offrir une garantie financière (“security for costs”) afin d’écarter les actions fantaisistes (“frivolous claims”).

l’obligation de nommer et fixer la rémunération des auditeurs lors de l’Assemblée Générale Annuelle des sociétés cotées, qui faisait l’objet de textes épars et partiellement contradictoires, est affirmée.

  • Loi sur les Marques

La nouvelle loi sur les marques remplaçant celle de 1976 (Trademarks Act 2019) a et adoptée en seconde lecture le 2 juillet.

Parmi les divers amendements au régime précédent, une attention particulière doit être portée dans une perspective de prévention et préparation aux contentieux éventuels, à la réforme du régime de l’enregistrement des licenciés de marque, qui détermine l’intérêt à agir indispensable à toute action en justice.

Le Trademark Acts 2019 crée une catégorie de “registrable transactions” et met fin au statut de “registered user” qu’il remplace par un système de licence sous la rubrique générale de registrable transactions.

Ceci est à examiner soigneusement par les sociétés françaises ayant consenti sous une forme ou une autre l’usage de leur marque à une société en Malaisie, qui peut être un distributeur ou un agent.

  • Douanes

Un amendement de la loi sur les Douanes ((Customs (Amendment) Act 2019) a été publié (“gazetted”) le 9 juillet.

Les changements sont profonds, puisque contenus dans 96 amendements, dont 61 nouvelles mesures, le tout reparti sur un document de 132 pages.

Très brièvement résumés, les points principaux à relever dans ce texte qui concernent (notamment) les entreprises françaises engagées dans des opérations d’importation et/ou d’exportation, portent sur la possibilité d’obtenir un rescrit (“ruling”) des autorités, la création de nouveaux délits comme la destruction de preuves conservées sur ordinateurs, la possibilité de nouvelles zones hors douanes, le pouvoir accordé aux services des douanes d’intercepter des échanges suspects, une extension de la responsabilité des administrateurs (“directors”) des sociétés concernées et un entier chapitre nouveau portant sur l’origine des produits.

Jurisprudence

  • Droits d’une tierce partie contre une procédure d’arbitrage

Par un arrêt du 1er juillet, la Cour Fédérale (Federal Court of Malaysia), la plus haute instance du pays, a fait droit à la requête d’une tierce partie visant à la suspension d’une procédure d’arbitrage dont elle se trouvait exclue.

Elle a ainsi donné raison à la High Court qui en première instance, avant que la Court of Appeal ne rende une décision en sens contraire, avait affirmé la supériorité du recours aux tribunaux (“litigation”) sur celui à l’arbitrage lorsque les droits d’une partie non signataire de la clause d’arbitrage peuvent être lésés par suite de son absence alors qu’ils seraient pris en compte dans une instance judiciaire.

Cet arrêt [Jaya Sudhir a/l Jarayam v Nautical Supreme Sdn Bhd & Ors] souligne la nécessité de considérer tous les aspects contractuels (ici un accord séparé avec une tierce partie) avant de rédiger une clause d’arbitrage. Il rappelle aussi l’importance de revoir les clauses d’arbitrage dans les contrats en cours non pas par simple référence à des modèles “standard” éventuels mais en fonction des circonstances à l’époque de leur conclusion.

  • Obligation de confidentialité dans une une procédure d’arbitrage

Par un arrêt postérieur et dans une affaire reliée à la précédente, la High Court de Malaisie a précisé l’étendue du devoir de confidentialité tel qu’il s’applique à des parties détentrices de telles informations mais qui ne sont pas parties à l’arbitrage.

En l’espèce, la High Court devait se prononcer (pour la première fois depuis l’entrée en vigueur du texte) sur l’interprétation à donner de l’article 41A de l’Arbitration Act tel que révisé en 2018 visant à interdire la diffusion d’information relative à la procédure d’arbitrage et à la sentence qui en découle sauf accord exprès des parties.

Dans sa décision [Dato’ Seri Timor Shah Rafiq v Nautilus Tug & Towage Sdn Bhd] la High Court affirme plusieurs points importants ayant valeur de référence dans des cas similaires ou comparables :

– la primauté de la règle édictée par l’Arbitration Act sur le principe de confidentialité dérivé de la common law ;

– l’affirmation de la règle selon laquelle la Section 41A est d’interprétation stricte et n’est pas applicable aux personnes qui ne sont pas parties à l’arbitrage; et

– le droit des dites tierces parties à se prévaloir des droits à la dissémination de l’information reconnus aux parties (par exemple en vue d’obtenir la protection d’un droit “ to protect or pursue a legal right or interest of the party”) par l’article 41(A)(2)(a)(i).

A nouveau, ceci confirme l’importance de se tenir régulièrement informé de l’évolution législative et jurisprudentielle dans l’ensemble des juridictions de common law d’inspiration britannique et Asie-Océanie et Asie du Sud (Inde). En effet, l’article 41A précité reprend les termes de l’article 18 de l’Arbitration Ordinance de Hong Kong (Cap 609) qui lui-même est inspiré d’une précédente version du texte miroir en Nouvelle-Zélande (Arbitration Act 1996, Public Act 1996 No 99). Il convient d’anticiper l’impact, qui peut typiquement dans ces juridictions de common law où la jurisprudence n’est pas seulement interprétative mais créatrice de droits, être jurisprudentiel avant d’être législatif.

Singapour

Jurisprudence

  • Décision de la Singapore International Commercial Court en matière d’arbitrage

La Singapore International Court ou “SICC” a rendu sa deuxième decision en rapport avec l’arbitrage le 19 juillet 2019 à la suite d’un transfert d’appel depuis la High Court en vertu du Supreme Court of Judicature Act.

L’affaire concerne deux personnes physiques, de nationalité thaïlandaise et cambodgienne, et une société australienne devant acquérir leurs activités via une structure à constituer. Le point de droit essentiel, parmi des circonstances extrêmement complexes et rendues encore plus difficiles à interpréter en raison de l’anonymat accordé par SICC, consistait à déterminer si une partie ayant transféré tous ses droits au titre du contrat de vente contenant la clause d’arbitrage à une autre partie pouvait prétendre être néanmoins partie à l’arbitrage. Au terme de raisonnements passablement labyrinthiques, le juge international chargé de l’affaire par SICC a décidé que la partie concernée avait le droit de présenter ses demandes et que le tribunal arbitral avait la compétence pour les apprécier.

  • Décision de la High Court en matière d’arbitrage

La High Court a rendu le 1er juillet un arrêt innovant en réponse à la demande d’une partie en rapport avec un arbitrage entre sociétés de République Populaire de Chine. La clause d’arbitrage n’était pas exempte d’ambiguïté, précisant que l’arbitrage s’il devait intervenir devait avoir lieu à Shanghai, mais confiant l’administration de l’arbitrage à SIAC (Singapore International Arbitration Centre) tout en omettant de spécifier le droit applicable à l’arbitrage ainsi que le siège (seat).

Sur le droit applicable, la High Court a déterminé que le choix explicite des parties était le droit chinois, mais que ce choix devait être écarté au profit du droit de Singapour parce que le droit chinois interdit les arbitrages “domestiques” (entre sociétés chinoises) en dehors de la République Populaire.

Sur le siège, la High Court a raisonné que puisque Shanghai ne constitue par une juridiction, il ne pouvait s’agir que du lieu physique de l’arbitrage tandis que le “seat” était par défaut Singapour.

Cet arrêt a été critiqué par la doctrine sous plusieurs angles. Dans l’attente d’un appel éventuel, ce qui est à retenir de la décision est, une fois encore, la nécessité de rédiger avec soin la clause d’arbitrage, qui doit contenir la désignation du siège et de la juridiction à laquelle il appartient et clairement désigner comme tel le lieu physique de l’arbitrage (“venue”).

Australie

Législation

  • Loi sur “Modern Slavery”

La loi spécifique à l’État de Nouvelles Galles du Sud (NSW Modern Slavery Act) qui devait entrer en vigueur le 1er juillet ne sera finalement pas appliquée à cette date, le cabinet du Premier Ministre de l’État ayant relevé certains défauts de rédaction pouvant rendre le texte inconstitutionnel.

Toutefois, ceci ne constitue qu’un report, et il est essentiel de rester vigilant au regard de ce texte, ainsi que de son équivalent au niveau fédéral (Commonwealth Modern Slavery Act) applicable depuis le 1er janvier 2019.

Les deux textes, complémentaires autant que conflictuels, ce qui soulève certaines difficultés d’interprétation, doivent être pris en considération par les sociétés françaises soit parce qu’elles opèrent en Australie, soit parce qu’elles concluent des contrats avec des sociétés australiennes et font partie de la “chaîne” de fournisseurs devant être conforme aux dispositions des “Acts”.

Plus généralement parce que le précédent australien constitue un modèle pertinent de comportement au regard de “modern slavery”, en particulier le travail forcé et celui des enfants et adolescents, dans les pays de l’Asie du Sud-Est où de telles législations sont absentes pour l’instant.

  • Lanceurs d’alerte

La loi fédérale sur la protection des lanceurs d’alerte est entrée en vigueur le 1er juillet (Treasury Laws Amendment (Enhancing Whistleblower Protections) Act 2019).

Elle concerne bien sûr les entreprises françaises déjà installées en Australie, mais pas seulement. Elle a des implications pour toute société ayant une relation d’affaires avec une société australienne, au regard de la nature des échanges et informations réputées de nature confidentielle entre les parties.

Jurisprudence

  • Contrats commerciaux complexes

En common law, une partie à un contrat tirant de celui-ci le droit, soit d’imposer sa continuité soit de le dénoncer en cas de manquement à ses obligations par l’autre partie, doit faire le choix entre les deux options et une fois ce choix fait, sa décision s’impose à lui.

Ceci est tiré d’un principe fondamental du droit contractuel (“doctrine of election”) et a fait l’objet d’une clarification par la Cour d’Appel de Nouvelles Galles du Sud (New South Wales Court of Appeal) dans un arrêt du 26 juillet [Donau Pty Ltd v ASC AWD Shipbuilder Pty Ltd].

Cette décision est la bienvenue car dans la pratique des affaires telle qu’elle de déroule dans la réalité, en particulier dans le cadre de contrats complexes portant sur des montants importants et à exécuter sur une relativement longue durée, il est fréquent qu’il soit difficile de déterminer le choix d’une partie.

En l’espèce, il s’agissait de la fabrication et fourniture de pièces essentielles de navires de guerre destines à la marine nationale australienne. Comme il est loin d’être inhabituel dans un tel contexte, les parties ont peu à peu dérivé des termes du contrat d’origine, puis sont convenues de reformuler ces termes de leur relation dans un nouveau contrat (Second Heads of Agreement) reflétant leur mode de fonctionnement tel que s’écartant du premier contrat.

Lorsque la première partie a souhaité actionner la clause de résiliation prévue au premier contrat, la seconde partie lui a objecté qu’en négociant le deuxième et en poursuivant les relations malgré les violations alléguées du premier contrat, elle n’avait pas affirmé de façon catégorique (unequivocal) son intention de choisir l’option de la résiliation de préférence à celle de l’exécution, et que dès lors elle y avait renoncé.

Ce raisonnement est conforme au principe de common law selon lequel les deux options doivent être mutuellement exclusives, or on ne peut pas à la fois se comporter comme si l’on souhaitait l’exécution d’un contrat et en demander la résiliation [cf. notamment Sargent v ASL Developments Ltd (1974)].

Les Juges composant la Court of Appeal, quoique étant en désaccord sur plusieurs points, ont décidé que la poursuite de relations d’affaires n’invalidait pas le droit à exiger la résiliation du contrat d’origine et par conséquent du deuxième qui en était issu, mais que ce droit devait être exercé dans un “reasonable time”, ce qui n’était pas le cas au vu des circonstances de fait.

Ceci résume un arrêt qui pourrait selon toute vraisemblance servir de référence pour les tribunaux appliquant la common law en Asie du Sud Est et Asie du Sud. Ses enseignements sont à retenir en cas de déviation consentie par les deux parties des termes d’un contrat commercial.

Inde

Législation

    • Création du Centre d’Arbitrage

Le Ministre de la Justice de la République Indienne a déposé devant la chambre basse du Parlement (Lok Sabha) le 3 juillet un projet de loi visant à la création d’un “New Delhi International Arbitration Centre”.

Il n’est pas trop tôt pour manifester son intérêt pour cette création et de déclarer une intention de soumettre des litiges commerciaux internationaux dans les contrats à venir à cette nouvelle institution car manifestement ce Centre ne manquera pas d’arbitres compétents en common law et ses sentences seront dès lors et du fait de leur qualité, aisément applicables selon la Convention de New York.

  • Révision de la loi sur l’arbitrage

La chambre haute du Parlement indien (Upper House / Rajya Sabha) a adopté le 18 juillet un amendement (“2019 Amendment Bill”) à la loi sur l’arbitrage (Arbitration and Conciliation Act).

Le texte, qui reprend pour l’essentiel les termes de celui voté par la chambre basse du Parlement (Lower House / Lok Sabha) l’année précédente, contient plusieurs dispositions destinées à réguler et rendre plus attractif l’arbitrage en République Indienne :

création d’un “Arbitration Council” indépendant chargé notamment de définir des règles pour l’évaluation des institutions arbitrales, pour l’accréditation des arbitres et généralement pour encadrer les procédures d’arbitrage ;

définition des conditions de qualification et d’expérience exigées des arbitres ;

– possibilité pour la Cour Suprême (Supreme Court) et la High Court de déléguer la désignation des arbitres à la demande des parties à des institutions arbitrales ;

protection des arbitres contre les actions en responsabilité pouvant être engagées contre eux dès lors qu’ils ont agi “in good faith” en conformité de l’Arbitration and Conciliation Act et de ses règlements d’application ;

– obligation imposée aux arbitres, à l’institution arbitrale et aux parties de respecter la confidentialité de la procédure arbitrale, sauf lorsqu’il doit y être dérogé en vue d’appliquer la sentence arbitrale ;

exemption des arbitrages commerciaux internationaux de la limite de 12 mois (sauf extensions sous certaines conditions) pour la reddition des sentences arbitrales (la version 2019 de l’Amendment Bill ayant toutefois ajouté au texte précédent une clause de meilleurs efforts en vue d’accélérer la conclusion de l’arbitrage “as expeditiously as possible”).

  • Réglementation des emballages alimentaires

Le nouveau texte sur les emballages alimentaires (Food Safety and Standards (Packaging) Regulations, 2018) est applicable depuis le 1er janvier 2019.

Les matériaux utilisés comme l’encre des emballages doivent être conformes aux normes indiennes ainsi que définies par le Bureau of Indian Standards. Des règles spécifiques s’appliquent en outre, comme la teneur maximale de certaines substances telles que manganèse ou cobalt dans les emballages plastiques, et l’interdiction de l’usage du plastique recyclé… et même du papier journal.

Jurisprudence

    • Qualification de relation employeur à employé

Un arrêt de la Supreme Court en date du 24 juillet [The Officer In-charge, Sub-Regional Provident Fund Office & ANR. vs M/s Godavari Garments Ltd.] adresse une fois encore, et apporte de nouvelles lumières, au débat de ce qui constitue une relation employeur / employé lorsqu’une large latitude est laissée à ce dernier dans l’accomplissement de ses tâches.

La question est mondiale dans la perspective de la supposée “ubérisation” de l’économie mais aussi peut-être et plus largement encore lié à la parcellisation de la relation comme avec le télé-travail. A ce propos, voir dans notre Lettre d’Information n°1 le commentaire de la décision de la “Fair Work Ombudsman” à propos du lien juridique entre Uber et ses chauffeurs en Australie.

En l’espèce, la Cour Suprême indienne s’est livrée à une interprétation fine de ce qui caractérise, bien au delà du lien de subordination, une relation employeur / employé.

De particulière importance nous semble être son appréciation selon laquelle le critère de “contrôle” est obsolète et, comme affirmé par un jugement précédent cité dans l’arrêt de la Cour [Silver Jubilee Tailoring House and Ors. v. Chief Inspector of Shops and Establishments and And (1973)], adapté à une société rurale pré Revolution Industrielle mais dont la pertinence s’est trouvée progressivement érodée durant les deux décennies dès avant l’année de ce jugement.

La Cour, poursuivant ce raisonnement, a jugé que les critères à prendre en compte devaient être multiples.

En l’espèce, la société Godavari Garments faisait appel à des femmes dans le cadre d’un programme d’assistance aux plus démunis, pour coudre des pièces de vêtements. Cette société, pour refuser de contribuer à un fond d’aide sociale (EPF ou Employee Provident Fund) soutenait que les personnes étaient des sous-traitants indépendants et non pas des employés. La Cour a pris note des arguments avancés par Godavari Garments selon lesquels :

– les machines à coudre utilisées par les travailleuses étaient leur propriété ;

– celles-ci travaillaient à leur domicile et non pas dans des locaux de la société ;

– elles pouvaient effectuer le travail elles-mêmes ou le confier à une tierce personne ;

– il ne leur était pas demandé de se présenter même occasionnellement dans les usines de la société.

En outre, les travailleuses étaient rémunérées “à la pièce” et non pas au temps passé.

A l’inverse, il convenait d’observer que les matériaux (tissus, fil, boutons…etc.) étaient fournis par Godavari Garments.

De l’ensemble de ces éléments, la société Godari Garments concluait qu’elle n’exerçait pas la “supervision” qui est une caractéristique essentielle d’une relation employeur / employé.

La Cour a considéré de sa propre initiative un critère supplémentaire, celui du pouvoir de refuser le produit fini en l’absence de conformité avec les instructions données par l’acheteur du travail à façon. Dans cette hypothèse, s’appuyant sur son arrêt de 1974 [Silver Jubilee Tailoring House and Others v Chief Inspector of Shops and Establishments], elle a jugé que le droit discrétionnaire de Godavari Garments à rejeter les vêtements cousus constituait l’élément de contrôle et supervision caractéristique d’une relation de subordination.

Chine (Hong Kong SAR)

Jurisprudence

    • Action publique contre un administrateur (director)

La Commission de la Concurrence de Hong Kong (Hong Kong Competition Commission) a, le 3 juillet, transmis au tribunal spécialisé compétent (Competition Tribunal) une plainte en pratique anti-concurrentielle pour entente dans des services de redécoration de logements sociaux.

Ce qui rend cette affaire intéressante au delà du droit de la concurrence et du droit des sociétés de Hong Kong généralement, est son interprétation des devoirs d’un administrateur. La Commission a requis la disqualification à exercer un mandat de “director” contre un administrateur dont elle admet qu’il n’a été ni directement ni indirectement impliqué dans le délit d’entente sur les prix, mais “avait des raisons de soupçonner un comportement délictueux et n’a pris aucune mesure pour l’empêcher” et “aurait dû connaître l’existence” de ce comportement.

Ce cas sera à suivre, car pouvant avoir pour conséquence d’élargir encore le champ de la responsabilité des “directors” dans les juridictions de common law asiatiques. La Commission ayant pris soin de ne demander aucune sanction pécuniaire contre l’intéressé, vise manifestement à établir un nouveau niveau d’exigence dans l’exercice du mandat d’administrateur de société.

Myanmar

Législation

    • Investissements étrangers dans les sociétés cotées

La Securities and Exchange Commission du Myanmar (ex Birmanie) a émis le 12 juillet une “Notification 1/2019” annonçant le droit des étrangers, personnes physiques ou morales, d’acquérir des actions dans des sociétés birmanes cotées sur le Yangon Stock Exchange.

Il est implicite que ces investissements ne pourront pas excéder 35% du capital, car au delà de ce pourcentage une société est réputée étrangère selon le droit des sociétés ([Myanmar Companies Law (2017)]. Une société cotée en Bourse localement ne peut sans graves inconvénients tomber sous ce statut qui comporte beaucoup de restrictions, parmi lesquelles l’interdiction de posséder des terrains [Transfer of Immovable Property (Restriction) Act (1987)].

Papouasie Nouvelle Guinée

Législation

    • Convention de New York

La Papouasie Nouvelle Guinée est devenue partie à la “Convention de New York” [Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères].

L’instrument d’adhésion a été déposé le 17 juillet, et prendra effet comme prévu à la Convention le 15 octobre. Le dépôt n’était assorti d’aucune réserve (notamment “réserve de réciprocité” ou “réserve de commercialité”), la Convention deviendra donc applicable dans son intégralité.

Vous avez apprécié le contenu de cette Newsletter ? Nous serions honorés de vous compter parmi nos lecteurs. La page d’inscription est à votre disposition.

Nous garantissons la confidentialité de vos données. Leur usage sera strictement limité à l’envoi de notre Newsletter. Vous pourrez vous désinscrire à tout moment grâce au lien prévu dans chacune de nos Newsletter.

Pour des précisions en rapport avec les thèmes évoqués ou des sujets connexes, merci de nous consulter via notre page contact.

Le contenu ci-dessus est à but purement informatif en rapport avec une sélection de l’évolution législative, réglementaire et jurisprudentielle dans la zone géographique concernée, qui ne peut être et ne prétend pas être exhaustive.

Il ne constitue pas un avis juridique en rapport avec un cas particulier et ne doit pas être considéré comme tel.Il peut nous être demandé une étude doctrinale plus approfondie en rapport avec l’un quelconque des thèmes évoqués.

Philippe Girard-Foley LL.M. (Penn) est membre du Law Institute de l’état de Victoria (Australie), avocat étranger accrédité auprès de la Cour Commerciale Internationale de Singapour, avocat conseil de la Chambre de Commerce Franco-Malaisienne et instructing solicitor devant les tribunaux malaisiens, membre du Chartered Institute of Arbitrators de Londres, branche de Kuala Lumpur, et seul avocat indépendant ayant un “correspondant organique” reconnu par l’Ordre des Avocats de Paris en Inde (New Delhi).